Mot du Pr Bourrel
Le souci d’une approche centrée sur la personne engage le DMG de Montpellier-Nîmes dans une réflexion à la fois épistémologique, méthodologique et éthique. Nos collègues canadiens ont l’habitude de présenter le médecin généraliste comme un « expert en processus », c’est-à-dire que son expertise est « en acte », davantage orientée vers le savoir-faire et le savoir-être. Déjà, en 1994-1996, le DMG avait organisé avec des personnalités invitées un cycle de formation pour ses enseignants sur les « processus », dont a été issue une matière enseignable sur les techniques de communication, l’entretien, l’éducation du patient, le travail en interdisciplinarité; elle est encore utilisée aujourd’hui et sans cesse retravaillée. Il développe ce corpus dans l’enseignement du DES, dans un certain nombre de DU (l’entretien motivationnel, la prise en charge de la santé mentale en soins primaires, la pédagogie médicale) ou encore dans le Master 2 Recherche « Santé, maladie chronique et société » auquel il participe (éthique, relation de soin, expériences de patients et de soignants).
Depuis 2008, la médecine générale est universitaire et ambulatoire (décret du 8 Février 2008). Depuis cette période, le DMG travaille sur l’universitarisation de la Médecine Générale qui est à construire, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur. De la même manière que la loi Debré de 1958 a dessiné les contours du système de soins français pour longtemps, ce décret est de nature à transformer ce système. Il faudra du temps. L’entrée prochaine de la Médecine Générale au CNU va contribuer à cette universitarisation. En 2008, le DMG a remis à l’ARH et à l’URCAM, intitulé « Etudes préalables sur l’universitarisation de la Médecine Générale » après un travail en commun pendant 2 ans avec le Pôle de santé de l’2cole Centrale de PAris (M.Daigne). Ce travail, le DMG le poursuit et l’adapte au fil des innovations sanitaires structurelles comme les Maisons de Santé Pluriprofessionnelles et des besoins de l’organisation sanitaires territoriale à laquelle participent ses membres. La participation à la modélisation de l’organisation professionnelle est une préoccupation des DMG car sa responsabilité est de former les futurs praticiens qui travailleront dans les territoires.
Cependant, cette universitarisation ne peut se faire sans le développement d’une recherche clinique qui lui soit propre. Cette recherche est indispensable à la discipline sur le plan épistémologique et méthodologique pour asseoir sa spécificité, elle l’est aussi pour la nécessaire production d’informations pertinentes dans le champ des Soins Primaires et en particulier dans le suivi des maladies chroniques.
Le DMG s’est engagé dans la recherche qualitative issue des sciences humaines et sociales, car c’est à partir d’elle, à côté de la recherche clinique épidémiologique, que l’on pourra renseigner l’indispensable « suivi personnalisé des malades chroniques ». Ce suivi passe par l’exploration et l’analyse de l’expérience vécue des patients, de leurs représentations, de leurs conceptions qui éclairent leurs comportements en santé et leurs parcours de soins; mais aussi par celle de l’expérience des soignants, car un bon soignant est un soignant qui est capable d’un retour réflexif sur sa pratique. Ce travail sur « l’expérience en santé », le DMG de Montpellier a l’ambition de la modéliser en un corpus enseignable pour les professionnels de santé; aujourd’hui, il développe des formations dans ce domaine. Cependant, il ne pourra institutionnaliser cette recherche et la pérenniser qu’en s’appuyant sur les autres disciplines cliniques en charge des maladies chroniques. C’est probablement son futur chantier.
Pr Gérard Bourrel – Professeur Emérite
Novembre 2013